dimanche 24 octobre 2010

Xinran

Xinran est née en 1958. Pendant la révolution culturelle, elle et son frère sont enlevés par les Gardes rouges, à leurs parents jugés « réactionnaires » et envoyés dans un orphelinat réservé aux enfants de « chiens à la solde de l’impérialisme ».
A partir de 1983, la Chine a besoin de personnes pour développer la télévision et la radio, capables de diriger des émissions de débat éducatives tout en s’assurant que les sujets « interdits » sont évités. Xinran devient rapidement l’animatrice d’une émission de radio, Mots sur la brise nocturne, diffusée quotidiennement entre 22h00 et minuit.
En 1997, elle décide de quitter la Chine et s’installe en Angleterre. Elle s’y marie et a un fils.
Depuis la publication de son premier livre, Chinoises, un best-seller international, Xinran est connue dans le monde entier. Elle publie une colonne bimensuelle dans The Guardian sur les questions relatives à la Chine et tient le rôle de conseiller aux relations avec la Chine pour de grandes corporations comme la BBC.
(Sources : http://www.editions-picquier.fr/)


Funérailles célestes
En 1956, Wen et Kejun sont deux jeunes étudiants en médecine, plein de l'idéologie communiste en vigueur en Chine. Alors qu'ils ne sont mariés que depuis trois mois, Kejun s'enrôle comme médecin volontaire dans l'armée chinoise en partance pour le Tibet. Quelques mois plus tard, Shu Wen apprend que Kejun aurait trouvé la mort sur les plateaux tibétains. Ne pouvant y croire, elle décide alors de se rendre en plein conflit sino-tibétain au Tibet afin de partir à la recherche de son mari et de découvrir ce qui lui est réellement arrivé...

Quel roman magnifique! Xinran décrit ici un formidable portrait de femme avec le destin extraordinaire de Shu Wen, confrontée à un paysage et un mode de vie auxquels elle n'a absolument pas été préparée. Liée d'amitiée avec Zhuoma, fille d'un chef de clan tibétain, recueillie par des nomades explorant toutes les montagnes sacrées du Tibet ainsi que les innombrables plaines, Shu Wen n'aura de cesse de consacrer sa vie à retrouver son mari.

J'ai été littéralement transportée au Tibet, suivant pas à pas les recherches de Shu Wen, tremblant, espérant pour elle et les amis qu'elle se fait au cours de sa vie au Tibet. Coupée du monde, Shu Wen ne sait rien des multiples bouleversements qui ébranlent la Chine - la mort de Mao, la Révolution culturelle, les réformes de Deng Xiaoping. Au contraire, là-bas, Shu Wen apprend la spiritualité au contact de ces gens simples dont la vie est rythmée par les saisons et les transhumances.

J'ai adoré ce roman; j'en suis d'ailleurs encore complètement émue. Se dire d'autant plus qu'il s'agit d'une histoire est encore plus bouleversant. Xinran, avec ce récit, a ainsi montré jusqu'où l'on peut aller par amour et par détermination. Un immense respect pour Shu Wen, et un grand bravo pour Xinran d'avoir retranscrit ici son histoire.

Ma note : 5/5
(Éditions Philippe Picquier, 190 pages)
Lu en décembre 2007

Baguettes chinoises
Baguettes chinoises raconte la destinée de trois femmes dans la Chine d'aujourd'hui. Trois, Cinq et Six ont quitté leur village pour partir travailler à Nankin, ville tellement éloignée à leurs yeux du monde dans lequel elles ont vécu jusqu'à présent. Quel choc pour ces jeunes femmes n’ayant jamais vu de leurs yeux un ordinateur, n’étant jamais monté dans une automobile, n’ayant jamais réellement circulé librement dans les rues ! Et c’est par leur travail que ces trois sœurs vont acquérir peu à peu leur autonomie puis leur confiance en elle pour enfin, s’affranchir des carcans de la société de leur milieu et devenir libres.

Inspiré d’histoires vraies, Baguettes chinoises est un très beau portrait de ces Chinoises d’aujourd’hui, dans un pays de plus d’un milliard d’habitants, qui, brusquement à partir des années 90, s’ouvre au monde et à « l’économie de marché ». Le bouleversement est immense pour ce peuple ayant connu pendant des années le régime maoïste avec ses aberrations et ses horreurs, notamment lors de la révolution culturelle que Xinran mentionne par instants dans son récit. Mais plus encore que les hommes, ce sont les femmes qui ont vu leurs existences chamboulées par la transformation de la société. Autrefois considérées comme seulement bonnes à faire des enfants (et des fils si possible) et à tenir la maison, les femmes désormais gagnent leurs vies, et très souvent comme les trois sœurs dont il est ici question, ce sont elles qui assurent la subsistance du reste de leurs famille restée à la campagne. La secousse est immense pour ces campagnardes brusquement propulsées dans un nouveau monde. Ainsi, même si Nankin n’est pas si loin d’où habitent leurs parents, Trois, Cinq et Six se rendent très vite du fossé entre les villes et les campagnes, restées encore en pleine féodalité.

C’est une Chine méconnue qui s’ouvre ici aux yeux du lecteur. Mais encore plus, ce sont des personnalités étonnantes de femmes que Xinran ici met en valeur. C’est avec un immense respect que nous suivons le parcours de ces femmes, de leurs doutes à leurs espoirs, de leurs déceptions à leur réussite finale, lorsque leur père reconnaîtra enfin le bien que ses trois filles ont pu apporter à leur famille de par leur travail et l’argent amassé.

Xinran, à la fin du récit, apporte un éclairage particulier sur le devenir de ses femme et plus particulièrement, sur celles qui ont inspiré les héroïnes fictives de ce récit. La lecture en est ainsi d’autant plus intéressante que l’on sent l’intérêt et encore plus l’amitié de Xinran envers ses consœurs, qui, coûte que coûte chercheront à s’élever au dessus de leurs conditions et assouvir leurs rêves.

Pour nous, femmes occidentales, Baguettes chinoises devrait être un exemple. Encore plus, c’est d’une leçon d’humilité et de courage dont il est ici question. Et rien que pour cela, le destin de ses trois femmes restera à jamais gravé dans notre cœur.

Ma note : 4/5
(Éditions Philippe Piquier, 340 pages)
Lu en septembre 2009

Chinoises
Journaliste chinoise à la radio d'Etat, Xinran a recueilli pendant huit années les témoignages de ses compatriotes lors de son émission radiophonique "Mots sur la brise nocturne". Chinoises est un condensé de plusieurs de ces histoires tour à tour émouvantes, tragiques et poignantes.

Ces destins de femmes font parti de ceux qui forcent l'admiration. Après Funérailles Célestes et Baguettes chinoises, Chinoises est le troisième récit que je lis de cet auteur et encore une fois j'ai été touchée par cette force d'évocation que possède l'auteur. Xinran réussit à disparaitre pour laisser en pleine lumière toutes ces femmes de générations, régions, cultures et conditions sociales différentes et qui, pourtant, toutes à leurs manières, lui expliquent leurs existences, leurs vies faites de souffrance, de peur, de tristesse mais aussi d'espoir.

Qu'est ce qu'être chinoise aujourd'hui? C'est pour répondre à cette question et comprendre ces millions de femmes que Xinran créa dans les années quatre-vingt son émission de radio qui obtint un succès considérable. Des milliers de témoignages de femmes ont alors afflué, forçant Xinran à découvrir des vérités pas toujours belles à voir. Mariages forcés, viols, pauvreté, folie, familles déchirées... C'est avec horreur et frisson qu'on lit certaines de ces histoires qui toutes sont malheureusement vraies. A travers ces témoignages de femmes courageuses et téméraires et sur lesquelles bien souvent toute une famille se reposait, apparait aussi une réalité : celle de la Chine de Mao puis de la Révolution culturelle dont les ravages seront bien nombreux. Autant dire que les premières victimes de ces années noires furent les femmes, écartelées entre le monde ancien où elles n'étaient rien et un monde "neuf" en plein chambardement et chaos et où elles étaient des proies et victimes faciles...

De ces récits souffle cependant un vent d'espoir et de bonheur. Car ces femmes, mine de rien, nous inculquent une leçon de respect inégalé. Toutes en effet oublient leurs tourments de brefs instants et ne se focalisent que sur l'amour. L'amour envers leurs parents, leurs frères et sœurs, leurs enfants, leurs amants. Et c'est avec émotion que j'ai refermé Chinoises tout en ayant une pensée émue pour toutes ces femmes inconnues mais rescapées de l'oubli à jamais grâce à ce récit.

Ma note : 4/5
(Éditions Philippe Pasquier, 330 pages)


22/26!

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