Ou "Chronique d'une métamorphose" est le journal qu'a tenu Imre Kerész de 1991 à 1995. Faisant aujourd'hui parti des plus grands écrivains hongrois du XXème siècle, Imre Kertész nous relate cependant le long cheminement de son âme en cette période troublée et étrange qu'ont connu les pays de l'Est après la chute de l'URSS en 1991.
Né à Budapest en 1929, Kertész, Juif hongrois, est déporté avec toute sa famille vers les camps de la mort en 1944. Imre Kértesz sortira miraculeusement des camps successifs d'Auschwitz et de Buchenwald mais restera à jamais marqué par cette épreuve où le reste de sa famille périra... Employé dans un quotidien hongrois dans les années cinquante en tant que chroniqueur, il est cependant mis au ban de la société par le gouvernement communiste alors en place. Ce ne sera donc qu'à partir de l'effondrement du régime communiste au début des années quatre-vingt dix que Kertész sera réellement reconnu et admiré et notamment en Hongrie, sa patrie d'origine.
C'est avec dérision et amertume que Kertész relate ses mémoires et notamment ses relations avec la Hongrie où depuis de années, il a été rejeté, dénigré, haï. Aujourd'hui, les nations du monde entier réclame son témoignage sur les camps de concentration nazis et Kertesz voyage donc sans relâche pour naviguer entre congrès, conférences et autres interviews. Traducteur des œuvres de Wittgenstein, Kertsez se sent influencé par les écrits de cet homme et se pose les questions éternelles sur son identité trouble et incertaine. Qui est-il vraiment lui, Juif Hongrois presque apatride? Qu'est il devenu du fait des multiples épreuves qu'il a pu traverser? A travers ses voyages, Kertész se cherche tout en ne se trouvant pas vraiment et découvre une Europe, notamment celle de l'Ouest qui lui était autrefois interdite. Le capitalisme le choque et le fascine tout à la fois, comme Israël où tant de Juifs persécutés ont trouvé refuge après 1945. Kertész ira jusqu'à faire pèlerinage à l'endroit où son père a été déporté même si, aujourd'hui, aucune trace ne subsiste...
C'est un véritable récit troublant où Kertész se livre tout en restant mystérieux sur son Moi le plus profond. Certes, on sent Kertész un peu perdu dans ce monde qui change si vite et où lui n'a plus trop sa place. Sa place n'est elle pas dans le Passé; l'Avenir lui serait il fermé? L'érudition de ce Prix Nobel est flagrante; qu'on ne s'y trompe pas, le témoignage de Kertész ici est d'une grande valeur.
Journal court mais témoignage fascinant; Un autre demeure un récit où rêves, souvenirs et expériences se mélangent pour former un ensemble homogène et de grande qualité même si l'écriture, de par la complexité oserai-je dire de certains passages, demande une concentration et une attention certaines.
Ma note : 3,5/5
(Éditions Actes Sud, 150 pages)
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