vendredi 27 août 2010

Les disparues de Vancouver - Elise Fontenaille

Elles s’appelaient Sarah, Heather, Nancy, Wendy, Marcella, Dawn, Sheryl, Tiffany, Elaine… Toutes prostituées à Vancouver, dans le downtown eastside, elles ont disparu sans laisser de trace et sans que personne ne s’en inquiète.

Wayne, fou amoureux de Sarah, l’une d’elle, est un des rares à s’en émouvoir et à tenter de lever le voile sur ces disparitions, qui atteignent ce chiffre fou de soixante-neuf. A partir de témoignages, souvenirs et autres fragments de leurs vies dissolues, la romancière Elise Fontenaille tente d’éclaircir ce qui allait devenir l’un des pires faits-divers du Canada.

Plus qu’un rapport des faits, le récit d’Elise Fontenaille est un véritable hommage à toutes ses femmes qui, à Vancouver, sont traitées comme des moins que rien. C’est vif, bouleversant de par sa véracité, poignant et atroce par instants : l’auteur ne néglige rien tout en restant résolument neutre et à l’écart car, ce qu’elle cherche à mettre en pleine lumière ce sont elles, les victimes.

Pauvres filles, tombées très jeunes le plus souvent et par désespoir dans la prostitution la plus sordide, entremêlée de drogue et d’alcool. Sans oublier les clients parfois dingues voire brutaux et qui n’hésitent pas à se défouler sur elles. Beaucoup d’entre elles proviennent des réserves indiennes ou descendent de parents natifs qu’elles n’ont jamais connus, à l’instar de Sarah, qui ne s’est jamais sentie à sa place dans sa famille adoptive. Ici l’auteur n’hésite pas à pointer du doigt la politique longtemps en vigueur et qui consistait à arracher les enfants indiens de leurs familles afin de les placer dans des foyers blancs. Une politique aux conséquences désastreuses.

On sort de ce récit répugné, horrifié, scandalisé aussi par le laisser-faire de la ville. Elise Fontenaille aura réussi ici à donner une véritable dignité à toutes ses femmes victimes d’un monde où elles étaient exclues et qui ne les reconnaissaient pas.

En réalité les filles du downtown eastside ne demandaient pas grand-chose, seulement le droit de vivre. Peut-être était-ce trop demander ?

Note : 3,75/5
(Editions Grasset, 191 pages)

Sélection Elle - Août 2010

1 commentaire:

  1. Bonjour Liza Lou,
    Je suis moi aussi jurée du Prix des lectrices de ELLE cette année!
    J'ai bien apprécié ce livre, mais j'ai regretté qu'il n'aille pas plus loin dans sa volonté de nous faire entrer dans la vie du personnage principal (Sarah)...

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